lundi 28 janvier 2013

La DEPECHE du MIDI 26 janvier 2013

http://www.ladepeche.fr/article/2013/01/26/1545653-les-aumoniers-et-la-paix-des-cultes.html


Les aumôniers et la paix des cultes 

Le père Étienne et la pasteure Isabelle dans la chapelle qu'ils partagent sur le camp de Deyr Kifa
Le père Étienne et la pasteure Isabelle dans la chapelle qu'ils partagent sur le camp de Deyr Kifa.

Étienne est catholique, Isabelle protestante. Lui est le nouvel aumônier du 1er RHP de Tarbes, elle a bourlingué ses prières jusqu'en Afghanistan. Tout pourrait les séparer et pourtant, ces deux-là font la paire par leur singularité, leur joie de vivre et leur humanité.
C'était au tout début de l'année. En ces périodes où se partagent les vœux et les bonnes résolutions. Au cœur du camp de la Finul, à Naqura, s'est tenue une cérémonie particulière initiée par Isabelle, la pasteure des forces armées françaises : un office interreligieux où ont communié une centaine de personnes, catholiques, protestants, sikhs et musulmans, rassemblés dans un temps de prière commun.
L'initiative pourrait surprendre. Elle s'explique tout naturellement lorsqu'on se penche sur les personnages qui se dissimulent derrière cette première. Isabelle la pasteure, déjà projetée en Afghanistan, nous accueille dans sa chambre dont l'ambiance évoque plus un repère d'ado avec ses posters du Stade toulousain et ses refrains de Coldplay qui résonnent. Des photos de famille, avec son mari et ses trois enfants, trahissent cette douce juvénilité. Il y a seize que cette pasteure, alors en paroisse à Paris, est rentrée dans les rangs. «Tout change, c'est un monde différent, décrit cette Toulousaine pétillante. Ce n'est plus la même logique.»

«L'opération peut être un temps spirituel»

À ses côtés, le parcours du padre est au moins aussi intrigant. Quand on ne le voit pas cavaler lunettes de soleil et biceps saillants autour du camp, difficile de présumer du haut degré de spiritualité qui anime ce diplômé de maths spé. «On m'a proposé de devenir aumônier. Avant, je n'avais pas eu de coup de cœur pour autre chose, raconte ce beau gosse qui prêche désormais au 1er RHP de Tarbes. C'est une double vocation, mais d'abord celle de servir Dieu et l'Église. À force de partager le quotidien des militaires, on fait partie de cette famille.» «C'est parce que je suis pasteure que je porte le treillis, abonde Isabelle, qui donne régulièrement des cours à l'intitulé déroutant : «La Bible pour les nuls». J'y trouve un sens. On apporte l'Évangile dans le monde militaire, tout en étant des vecteurs pour que les gens, ailleurs, aient le souci de leurs soldats.»
S'ils partagent la même chapelle au cœur du camp pour leurs offices, il «faut arriver à faire de la place pour ceux qui ont besoin de parler». Le sport, le foyer, l'ordinaire, même, sont autant de lieux prompts à recueillir les confidences. «Je suis convaincu du bienfait de la parole échangée, de mettre des mots sur des maux, apprécie la pasteure. C'est parfois plus simple dans l'intimité qu'avec ses camarades.» Un accompagnement et un soutien mais pas de jugement moralisateur. «Nous ne sommes pas des psys, coupe le padre. Les soldats reconnaissent en nous une certaine sagesse. On peut aider à discerner, mais on n'apporte pas de diagnostic ni de remède.» Cette proximité impose au duo une disponibilité constante. «Il faut être au milieu d'eux, qu'ils puissent nous tirer par la manche.» Le tout sans animosité ni rivalité entre les paroisses. «On ne parle pas tant de nos chapelles que de ce qui anime nos vies. Il y a de la place pour tout le monde», apaise Étienne. Et qu'importe le résultat : «On se sent utile, nuance Isabelle. Quand bien même ce ne serait pas le cas, la présence de l'Église est au-delà. C'est le signe de l'amour gratuit».
Un message intemporel, humanisé par un duo, non-armé, en phase avec son époque et son univers. Des bergers bienveillants avec leurs ouailles : «La place de la prière est primordiale en opération extérieure. Notre mission première, c'est sans doute de prier pour tous les gens qui nous sont confiés ici…».
La Dépêche du Midi

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